L'émeute du Lanturlu


Voici ce dit Arthur Kleinclausz dans "Histoire de Bourgogne" de cet évènement survenu en 1630. Après lecture, chacun pourra tirer ou non des conclusions en rapport avec l'oeuvre de Louis Bertrand.


"Dans les pays d'élection, les élus nommés par le roi, répartissaient l'impôt arrêté au Conseil d'Etat, le percevaient et jugeaient des causes s'y rapportant. En Bourgogne, c'étaient les Etats qui votaient la somme imposable ; les Elus de la province la répartissaient et en connaissaient. Reprenant un projet de Henri II, le Conseil du roi adopta, au mois de juin 1629, un édit partageant la Bourgogne en dix élections, de trente-trois officiers chacune ; il annonçait ainsi son intention d'introduire dans la province les aides ( impôts sur les boissons), dont elle avait été jusque-là exempte. Le Parlement et le Chambre des Comptes refusèrent d'obéir, malgré des lettres de jussion. Les Etats décidèrent de faire des remontrances, puis, pour ne pas envenimer les choses, ils offrirent de racheter l'édit 1 800 000 livres. Le Conseil ayant repoussé cette proposition, un violente émeute éclata à Dijon, le 27février 1630.

Le Parlement et la Chambre des Comptes.



"Les "tumultuans" mirent à leur tête un vigneron de haute taille, ancien goujat d'armée, Anthoine Changenet, surnommé le roi Machas. "Il marchait, couronné de lierre et drapé dans un manteau d'étoffe de toutes couleurs, évidemment emprunté au carnaval d'où l'on venait de sortir. Derrière lui, une cinquantaine de gens déterminés brandissaient quelques hallebardes, des pieux, voire même des échalats aiguisés ; quatre tambours grotesquement accoutrés entouraient le guidon consistant en une serviette clouée à une longue perche et que suivait une foule de femmes et d'enfants protégée par une arrière-garde. Tous chantaient le refrain vif et saccadé d'un vaudeville alors en vogue et qui s'appelait "Lanturlu"". Le premier jour, les insurgés assaillirent à coups de pierres, en proférant des menaces de mort, la demeure de Nicolas Gagne, trésorier de France, et de Legrand, président de la Chambre des Comptes. Le lendemain, au nombre de six cents, ils retournèrent chez ces deux officiers, détruisirent leur mobilier, burent le vin de leurs caves, et ayant rencontré le maire et les échevins à la sortie, ils les obligèrent à regagner l'hôtel de ville "plus vite que le pas". (.../...) Ni le maire, Bénigne Euvrard, ni les bourgeois n'avaient su faire leur devoir. Dans l'après-midi seulement, ils se décidèrent à sortir de leurs maisons. La milice des paroisses fit une décharge contre les insurgés, en tua douze, et mit le reste en fuite ; les principaux carrefours furent occupés militairement et, à quatre heures, tout était terminé." Nul doute, me semble-t-il, que cet épisode, burlesque et tragique, a eu la sympathie de Louis.